Suite à la décision du gouvernement de la Transition d’inhumer la dépouille de Thomas Sankara et de celles de ses douze compagnons d’infortune au Conseil de l’Entente, lieu où ils ont été assassinés le 15 octobre 1987, les membres de la famille du père de la Révolution d’août 83 ont indiqué leur non-participation à la cérémonie.
Les proches du capitaine Sankara estiment que le choix du lieu de l’inhumation n’a pas fait l’objet d’un consensus. Ils formulent le vœu que « la ré-inhumation du président Thomas Sankara se fasse de façon consensuelle dans la calme », car estiment-ils, « les prises de position des mandatés de l’organisation des inhumations sont, pour l’heure, susceptibles de semer la confusion et le désarroi, au moment où notre pays doit, plus que jamais, rassembler ses enfants. » Une réaction somme toute, légitime au regard d’un certain nombre de considérations.
Pour les proches de Sankara, le Conseil de l’Entente incarne le symbole d’un douloureux et triste souvenir, puisque c’est à ce lieu que l’innommable s’est produit dans une violence insoutenable. Se retrouver désormais à cette place pour se recueillir sur la tombe de leur fils, frère, époux, oncle revient à perpétuer leurs peines. En clair, un autre endroit serait plus approprié pour enterrer les restes du père de la Révolution.
Il est vrai que Sankara est devenu une icône nationale et internationale. Il appartient à la mémoire collective du Burkina Faso, parce qu’il a été porteur d’un immense espoir pour son pays. Tout symbole national et international qu’il est, Thomas Sankara appartient avant tout, à une famille. Plus que toute autre entité, elle a plus souffert de sa brutale disparition.
Il importe donc d’avoir une démarche inclusive pour que l’hommage qui va lui être rendu ne divise pas les Burkinabè. Il est encore temps de différer la cérémonie de ré-inhumation, le temps de trouver le consensus avec la famille du défunt.
Un minimum de consensus s’impose dans cette décision. Au-delà de la famille, ils sont nombreux les partisans de Sankara qui désapprouvent cette décision. Il est encore temps de sauver les meubles. Le président Sankara et ses douze compagnons peuvent être inhumés au Conseil de l’Entente, mais que vaudrait cette option si les proches des défunts ne viennent pas se recueillir sur leurs tombes ?
Dans ce contexte si délicat pour le Burkina, il faut éviter de créer d’autres situations de frustrations, au moment où toutes les énergies doivent converger vers l’effort de guerre. Il n’est jamais tard de bien faire. Il convient de prendre la bonne décision qui permettra aux Burkinabè, au-delà de la famille Sankara, et sympathisants de l’icône du panafricanisme, d’honorer sa mémoire dans la sérénité. En ce sens, le communiqué des membres de la famille de Thomas Sankara mérite d’être pris en compte. Il est impératif de trouver le juste compromis.
Ahmadou Bayala/Ouaganews