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« Gabriel Tamini m’a dit qu’il venait de la part de Blaise Compaoré et qu’il avait besoin de moi pour un coup d’Etat », Denis Bicaba, témoin

L’audition du témoin Somda K. Eugène, chef de l’infirmerie de la présidence du Faso en 1987, s’est poursuivie ce mercredi 15 décembre 2021. Dans la continuité  des questions de précision de part et d’autre des parties, il y a eu une confrontation avec des accusés.

Ce que l’on peut dire, c’est que le témoin Somda K. Eugène est  resté ferme sur ce qu’il a vu à la présidence. A la préoccupation du parquet militaire de savoir si en plus du soldat Nabonsnéwendé Ouédraogo, il y avait d’autres éléments qu’il a vus, le témoin dira :  « La première personne que j’ai vu et qui m’a intimidé, c’est Nabonsnéwendé. J’ai vu Maïga qui est allé chercher le lieutenant.

J’ai aussi vu Sow Drissa et quelqu’un d’autre qui étaient escortés. Quant à la présence de Nabonsnéwendé sur les lieux, son avocat Me Sombié Mamadou a demandé au témoin s’il n’a pas confondu son client avec un autre élément de la garde de Blaise Compaoré du nom de Ouédraogo Nassonswendé, un homonyme de son client. Somda  K. Eugène rétorque :  » Non, c’est celui qui était devant moi que j’ai reconnu.

Je connais l’autre  Nassonswendé aussi. Mis en confrontation avec l’accusé Nabonsnéwendé, ce dernier dira : « moi je n’ai pas vu  Somda, je n’ai pas vu le général Diendéré ce jour-là. Pour moi c’est une confusion avec Nassonswendé. Parce que même au niveau des salaires, il y avait dès fois la confusion et quand il prenait les crédits, on me coupait ».

Le témoin Somda restera sur son affirmation :   « Quand quelqu’un vous traumatise et que vous savez que vous pouvez mourir, vous ne pouvez pas enlever l’image de cette personne de la tête ». Mais, mordicus,  l’accusé ni sa présence  et dit qu’il est allé s’asseoir sur le banc, je ne pense pas qu’à cette heure-là, quelqu’un pouvait s’asseoir au Conseil « .

Le président du tribunal Urbain Méda reprend la parole en demandant à l’accusé Nabonsnéwendé s’il y a une ressemblance physique entre lui et le nommé Nassonswendé. Il  dira :  » une ressemblance de teint, mais une différence de taille. Mais Nassonswendé était-il présent au Conseil, le jour du 15 octobre 1987? Demande le président du tribunal.   » Je ne peux pas confirmer qu’il était sur les lieux, comme je ne l’ai pas vu, je ne peux pas confirmer qu’il était présent « .

Au sujet de la réunion du 15 octobre 1987  dans la matinée entre les deux gardes rapprochées, “ quand je suis arrivé, ils ont dit qu’ils voulaient une nouvelle réorganisation de la sécurité,  parce qu’il y avait des failles. Et  pendant la réunion, le lieutenant Gilbert Diendéré a dit que des tracts circulaient contre les deux leaders de la Révolution. Mais, ils nous a pas montré les tracts.

En ce qui concerne Bossobè Traoré, le 9 octobre, quand nous sommes allés chez son père, ils sont venus se cacher dans les fleurs, et c’est Kani Fankani qui m’a encore dit que Nabié N’soni lui a dit de se dérober de l’escorte parce qu’ils allaient nous canarder. Il a pris la route, il est passé par l’université, l’ambassade des USA et Koulouba. Quand nous sommes arrivés, j’étais fâché et j’ai dit à l’aide du camp de le sanctionner.

Après, l’aide du camp m’a dit qu’il faut d’abord chercher à comprendre et c’est là qu’il m’a dit que c’est son instinct. Je lui est dit que c’est faux. C’est après le 15 octobre qu’il est venu me dire que ce jour-là, on a échappé à un attentat. Un autre fait sur le coup d’Etat : “Kambou Diwélé est venu un jour à la présidence voir l’aide du camp du président Sankara.

Il a dit qu’il venait de Pô et sur la route, il a vu trois cargots qui venaient à Ouaga et il a pris contact avec un des chauffeurs qui lui a dit qu’ils viennent à Ouaga pour faire un coup d’Etat. Il venait donc voir le président. Quand il est rentré, ils sont sortis ensemble et le président a appelé le lieutenant Diendéré qui est venu et a dit qu’il n’était pas au courant, car il était en mission.

Il dit que même si c’était des soldats de Pô, c’est sûrement la relève qui venait au  Conseil. Le président Sankara  a demandé au lieutenant de l’arrêter et il a été enfermé au Conseil. Après le 15 octobre, il s’est retrouvé au Ghana et c’est en 1992 que je l’ai revu au Burkina Faso et il a été réhabilité, indique Somda K. Eugène.

La confrontation avec le Diendéré a été plus simple. Il  reconnaît les propos de Somda K. Eungène, mais affirme n’avoir pas aperçu le soldat Nabonsnéwendé. A la suite, un autre témoin a été auditionné, il s’agit du colonel-major à la retraite Sanou Blaise.   Il dira ce qu’il a fait le 15 octobre. « Nous étions en réunion, ce jour-là,  avec le Capitaine Henri Zongo avec des fournisseurs d’armements. C’est aux environs de 15h que nous avons entendu les premiers coups de feu.

J’ai demandé à un élément de sortir voir ce qui se passait. Il est revenu me dire que c’était les CDR du secteur n°4 qui tiraient. Mais à entendre les coups de feu, ça ne venait pas du secteur 4. J’ai donc envoyé un autre élément, Kagoné, d’aller voir au Conseil.

Il affirme avoir tenté de joindre la BIA de Koudougou et l’Etir de Kamboinsin sans succès, parce que les liaisons téléphoniques  étaient coupées avec eux. “J’ai demandé à ce qu’on distribue des armes aux éléments pour une éventuelle riposte, mais à ma grande surprise, les percuteurs des armes étaient enlevés.

J’ai demandé à ce qu’on arme les deux avions et un soldat du nom de Diallo Moussa est venu menacer de tirer si les éléments continuent de charger. C’est  vers 18h que j’ai  appris la mort du président ». Le témoin affirme avoir été arrêté le 4 novembre 1987 et libéré le 3 août 1989, soit 21 mois de détention.

A sa sortie de prison, il a été radié de l’armée, puis réhabilité en 1993. Selon le témoin, lui, Daouda Traoré et un autre officier de l’ETIR ont tenté de réconcilier Thomas Sankara et Blaise Compaoré. “ Nous avons dit à Blaise que nous allions organiser un meeting au cours duquel il allait prendre la parole en premier et après Sankara allait prendre la parole.

Mais Blaise a refusé en disant que s’il acceptait cela, c’est comme s’il avait tort. Cela m’a refroidit, dira-t-il. Pour ce témoin, plusieurs signes montraient  l’intention de Blaise Compaoré de prendre le pouvoir. Quant à Gilbert Diendéré, lieutenant à l’époque des faits, Blaise Sanou soulignera : “je le connais aussi bien, il n’y avait pas de zone d’ombre  entre lui et Sankara. S’il a basculé du côté de Blaise, c’est sûrement dû au problème de sa femme qui avait été radiée de la police par Sankara.

Le troisième témoin de cette journée a été l’adjudant-chef de l’armée de l’air à la retraite, Denis Bicaba dont le témoignage charge Gabriel Tamini. Ce dernier venait de rentrer de son stage à Cuba, quand il a constaté les divergences au sommet de l’Etat, le 4 août 1987, pendant la célébration de la 4e année de la Revolution.

Après, il a été appelé par Thomas Sankara qui avait besoin de lui pour consolider la Révolution, dit-il. Quelques temps après, Gabriel Tamini (qui se trouve être son beau-frère), est venu me voir de la part de Blaise Compaoré. Il m’a dit qu’il avait  besoin de moi  pour un coup d’Etat.

Je lui ai dit que je voulais 4 jours pour réfléchir. Après, je suis allé voir Sankara pour lui dire qu’il y avait un coup d’Etat qui se préparait. Il m’a dit de dire à Tamini de venir le voir. Quelques temps après, quand il est reparti vers le président Sankara pour savoir ce qu’il voulait prendre comme décision, ce dernier lui a dit : “Si je travaille chaque jour jusqu’à 2h du matin pour ce pays, et personne ne le reconnaît, d’autres gens en d’autres époques me le reconnaîtront. Si vous entendez des coups de feu, sortez et ripostez.

Après être sorti de prison et après sa réhabilitation, le témoin s’est exilé aux USA où il a passé 13 ans. Le témoignage du sergent Nana Ambroise, chauffeur de madame Chantal Compaoré, n’aura rien apporté au tribunal comme information. Il a dit  seulement conduire Salif  Diallo et Gabriel Tamini au domicile de Blaise Compaoré, le jour du 15 octobre.

Quant à Adama Tinto, son témoignage a porté sur l’existence des postes dits Delta Nord et Delta Sud au domicile de Blaise Compaoré à Koulouba. Son témoignage va à l’encontre des propos de l’accusé Sawadogo Idrissa qui affirme avoir été envoyé à ce poste Delta Nord par Hyacinthe Kafando. La journée a pris fin avec la déposition du colonel-major de 72 ans à la retraite, Yaméogo Louis Johanny, commandant de la 4e région militaire basée à Bobo en 1987. Son audition se poursuit ce jeudi.

Moussa Wandaogo/Ouaganews

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