Les témoins dans le procès Thomas Sankara et 12 de ses camarades assassinés le 15 octobre 1987, ont commencé leur témoignage à la barre, ce mardi 16 novembre 2021. Il y a eu aussi des confrontations entre des témoins et des accusés.
Le colonel-major à la retraite Daouda Traoré est intervenu à la barre, en tant que témoin dans le procès Thomas Sankara et 12 de ses camarades. A l’époque des faits, il était le commandant du Régiment d’infanterie commando de Fada.
Il raconte que suite aux tracts qui faisaient état d’un malaise entre les deux leaders de la Révolution, ils ont rencontré Blaise Compaoré à ce sujet. « Il nous a dit qu’il n’utiliserait même pas une brindille contre Thomas Sankara.
C’était entre le 12 et 13 octobre 1987. Et comme il y avait une visite à la mine de Poura, on s’était dit que c’était l’opportunité de rassurer tout le monde qu’il n’y avait rien entre eux. Et Blaise Compaoré devrait faire une déclaration à cette occasion ».
C’est lorsqu’il s’apprêtait à aller à son poste à Fada qu’il y a eu le coup d’Etat. Daouda Traoré raconte » : j’ai appelé au Conseil de l’entente pour savoir où était le président Thomas Sankara et c’était Gilbert Diendiéré qui était au bout du fil.
Il m’a passé Hyacinthe Kafando qui, à son tour, m’a passé Blaise Compaoré. Et il m’a dit de me calmer, qu’il a aussi perdu des éléments, mais que la révolution continue.
Le 16 octobre 1987, j’ai appelé Blaise Compaoré pour lui dire que j’allais repartir à Fada, mais il m’a donné l’ordre de rester. Daouda Traoré affirme au tribunal avoir été victime de 4 tentatives d’assassinat.
Après l’assassinat de Sankara, ils m’ont donné deux jours pour rejoindre le Front populaire. Ainsi j’ai été détenu du 24 octobre 1987 au 25 mars 1988 pour participation passive au complot de 20 heures. Puis, j’ai été radié de l’armée. Et c’est Jean Pierre Palm, alors commandant de la gendarmerie à l’époque, qui a procédé à notre libération Moussa Diallo et moi.
Confrontation Daouda Traoré-Jean Pierre Palm-Gilbert Diendéré
Après le récit du témoin Daouda Traoré, l’accusé Jean Pierre Palm a été de nouveau appelé à la barre pour une confrontation. Jean Pierre Palm dira : « je ne sais pas comment ils sont arrivés au Conseil de l’entente.
Ce n’est pas moi qui les a libérés ». Mais, le témoin insiste que c’est le colonel Palm qui a procédé à notre libération et d’ajouter qu’il se rappelle bien des conditions. Ensuite, c’est le général Gilbert Diendéré qui est rappelé à la barre pour parler de la mission de sécurisation du domicile de Daouda Traoré.
Il confirmera la mission. » Il y avait à l’époque, un certain nombre de familles qui se sentaient menacées. Il fallait les rassurer, sinon je n’étais pas au courant de la libération de Daouda Traoré par la gendarmerie.
Selon le témoin Daouda Traoré, l’assassinat de Thomas Sankara a été minutieusement préparé. Et tous étaient au courant. Mais quand on le disait à Sankara, il répondait : » si tu touches à un cheveu de Blaise Compaoré, on ne se parlera plus jusqu’à la fin de nos vies. Il m’a aussi dit : laissez-les nous tuer, les gens parleront de nos oeuvres ».
Sankara a refusé l’exil (Boukary Kaboré dit le Lion)
Témoin dans ce procès, Boukary Kaboré dit le Lion, est venu relater sa version des faits. Avant, il fera des observations sur l’intitulé du procès. On devrait dire selon lui, le procès Thomas Sankara et 27 de ses camarades, car il ne faut pas oublier Michel Kouamé, responsable de l’ETIR à l’époque, Seydou Bancé, Vincent Sigué et les 11 morts de Koudougou au même moment.
Il ajoutera que Sankara était dépassé par les évènements. Selon lui, on l’a « wacké », d’abord avant de le tuer. Sinon à un moment donné avec la complicité de Jerry Rawlings, on voulait qu’il parte en exil au Ghana. Il a refusé, car il préférait mourir dans son pays.
Moussa Wandaogo/Ouaganews