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Achat d’un véhicule à 96 millions F CFA : la légalité doit-elle occulter les priorités ?

A l’issue du conseil des ministres du mercredi 7 juillet 2021, le ministre de la communication, porte-parole du gouvernement, Ousséni Tamboura, a réagi à propos de l’achat d’un véhicule à 96 millions de F CFA, au profit du département en charge de la culture.

Selon lui, l’achat du véhicule s’inscrit dans « une pratique légale ». Et d’ajouter que« le département des finances est un département très professionnel ; s’il n’y avait pas de prévision, s’il n’y avait pas de cadre juridique qui autorisait une telle acquisition, cela n’aurait pas pu être. Il faut considérer que c’est une voiture qui va être achetée pour le parc automobile de l’Etat, pour le parc automobile du Ministère de la culture ».

Certes, l’on peut comprendre que l’acquisition a été faite dans un cadre légal, mais cette légalité autorise-t-elle tout ?  Doit-on prendre des décisions sans tenir compte du contexte, quand bien même les textes l’autorisent ? Un gouvernement doit-il reléguer au second plan ses priorités, parce que la légalité permet de prendre certaines initiatives.

La sortie du ministre de la communication sur cette question dessert le gouvernement dans ce contexte de lutte contre le terrorisme et d’augmentation des prix des denrées de première nécessité. Le gouvernement ne saurait prendre des décisions, sous le prétexte que la loi les autorise. C’est à l’analyse de la situation actuelle que les priorités gouvernementales doivent être arrêtées.

C’est inconcevable que pendant que plus d’un million de Burkinabè, du fait de l’insécurité, dorment à la belle étoile dans des camps de fortune, que le gouvernement permette l’achat d’un véhicule de 96 millions de F CFA, fût-il un bien de l’Etat. Pendant que les braves forces de défense et de sécurité affrontent toutes sortes d’intempéries pour lutter contre les terroristes, il est inadmissible que l’on autorise des dépenses, à la limite, surréalistes.

A-t-on vraiment besoin d’un véhicule de 96 millions de F CFA pour circuler dans ce Burkina ?  Au-delà de la loi qui encadre l’action publique, il sied d’examiner avant tout, la portée des décisions sur le quotidien des citoyens.  La légalité ne rime pas avec aveuglement, encore moins avec déni de la réalité.  Par-delà ce qu’autorise la loi, le gouvernement ne peut engager des dépenses à tue-tête, sans le moindre recul.

La justice sociale n’est effective que lorsque les dirigeants travaillent en ayant en ligne de mire les préoccupations profondes des populations. L’on se rappelle que sous le premier mandat du président du Faso, l’achat des véhicules de marque Talisman à 2 milliards de nos francs au profit des   ministres, avait défrayé la chronique.

L’on ne peut pas diriger un Etat sans tirer leçon des décisions impopulaires. L’on n’a pas besoin de ce type de débat, au moment où l’hydre terroriste veut à tout prix, saper le moral des Burkinabè. Des gens ont, au nom de lois iniques, orchestré l’exploitation des autres, autorisé la mort de leurs semblables ou privé de droits civiques leurs concitoyens.

C’est pour dire que la légalité n’est pas exempte de tout reproche. Comme toute construction humaine, elle peut avoir ses limites objectives. A défaut, même si l’on veut s’en prévaloir, que l’on fasse preuve de recul, d’interrogation. L’histoire de l’insurrection populaire est encore vivace dans les esprits, pour nous apprendre beaucoup de choses sur la légalité.

Au nom de cette même légalité, des gens ont voulu prendre en otage tout un peuple, à cause de leur boulimie du pouvoir.  Sachons tirer les enseignements de notre passé récent et de notre quotidien pour mieux agir au service de l’intérêt général. A vouloir à tout prix, voir des manœuvres politiques de discréditation de l’action gouvernementale dans les critiques à l’endroit des autorités, on court le risque de banaliser de précieux conseils.

Comme l’a si bien dit un internaute averti, « tout ce qui est légal dans une République n’est pas nécessairement juste… Seule la conscience réflexive des acteurs, prenant la pleine mesure du contexte et des fins éthiques poursuivies par la communauté, peut donner force et sens à la pure légalité. Le légalisme n’est ni plus ni moins que l’alibi d’une surdité au réel ».  Il importe donc, de sortir des postures partisanes pour mieux porter l’action collective et répondre, un tant soit peu, aux aspirations profondes du peuple.

La Rédaction/Ouaganews

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