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« Tu sais pourquoi on ne t’a pas tué, c’est parce que tu ne sais rien » a dit Hyacinthe Kafando à Laurent Ilboudo

Dans le cadre du procès Thomas Sankara et 12 autres de ses compagnons, trois témoins ont été entendus,  ce lundi 6 décembre 2021. Il s’agit du sergent-chef, Laurent Ilboudo, chef de la garde rapprochée du président Thomas Sankara, de Sow Drissa, son adjoint et infirmier à la Présidence du Faso et de Zidwouemba Claude François, soldat de première classe au moment des faits. 

Chef de la garde rapprochée du président Thomas Sankara, au moment des faits, Laurent Ilboudo raconte.  » Le 15 octobre, j’étais au rez-de-chaussée avec les deux fils du président Sankara, Auguste et Philippe, quand il est sorti avec une mallette. J’ai pris la mallette et on a quitté le palais pour la Présidence du Faso. Là-bas, il est monté au bureau et redescendu quelques minutes plus tard, pour aller au Conseil.

Arrivé sur place, je suis descendu et j’ai jeté un coup d’oeil de gauche à droite avant d’ouvrir la portière pour le président et je l’ai suivi dans la salle où j’ai déposé sa mallette et son PA sur le fauteuil avant d’aller saluer les camarades au secrétariat.

C’est là-bas qu’on a entendu les tirs et spontanément, la 504 blanche de Blaise Compaoré est venue défoncer le couloir du secrétariat général du CNR. Je suis sorti pour voir ce qui se passe et j’étais face à face avec Hyacinthe Kafando. Il m’a dit : « haut les mains et détache ton ceinturon ».  Je lui ai dit : « viens le détacher toi-même ». Ensuite, j’ai détaché mon ceinturon et mon arme est tombée.

Ils nous ont amenés à l’arrière de la salle et nous ont mis à plat ventre. Et les rafales ont commencé. J’ai levé la tête et j’ai vu Wempasba Nacoulma. Après, on nous a mis dos à dos, j’étais avec Sow Drissa et j’étais face au tireur. On nous a  amenés dans une salle et nous ont enfermés.

Dans le couloir, j’entendais une voix dire où est Laurent, il faut le faire sortir, on va finir avec lui. Et c’est Hyacinthe Kafando qui a ouvert la porte et il m’a dit tu sais pourquoi on ne t’a pas tué, c’est parce que tu ne sais rien. C’est après que j’ai appris qu’il y a un de nos éléments qui était blessé et qui se trouvait à l’hôpital.

Je m’y suis rendu et j’ai vu Bossobè Traoré, il était ahuri. Et c’est après que j’ai appris que c’était Bossobè qui nous a trahis en donnant l’information au commando. Il affirme aussi qu’il n’était pas au courant de la rencontre entre les deux gardes rapprochées des deux leaders Sankara et Blaise.

L’avocat de Bossobè Traoré, Me Kanyili Maria a demandé la confrontation avec son client. Le témoin Ilboudo Laurent a affirmé que Bossobè Traoré n’était pas de service avec eux, ce jour. Ce dernier dira que chef Laurent a oublié qu’on les avait écartés parce qu’ils étaient vieux, mais ils ont été rappelés parce qu’on estimait que les jeunes ne maîtrisent pas le travail.

Laurent Ilboudo dit que le 16 octobre, c’est Gilbert Diendéré, Hyacinthe Kafando et Tibo Ouédraogo qui sont  venus les libérer. En partant, Tibo Ouédraogo nous a dit de bien nous tenir et de ne pas aller raconter du m’importe quoi.

Ensuite, c’est Gilbert Diendéré qui est venu confirmer que c’est lui qui est venu les libérer. C’est le 16 octobre que j’ai appris qu’il y avait des éléments détenus au Conseil de l’entente. J’ai informé Blaise Compaoré qui m’a dit de les libérer pour leur propre sécurité.

Pour Me Kanyili Maria, Laurent Ilboudo et  Sow Drissa se sont entendus pour rejeter la faute sur son client Bossobè Traoré

Avec un tempérament chaud, Sow Drissa, adjudant-chef à la retraite, celui qu’on appelait major a donné sa version des faits. Il a été en service au CNEC à Pô, puis au Conseil. Il dit que le jour du 15 octobre il était au service au palais à 7h. A 15h, nous avons quitté le palais avec le président Thomas Sankara pour le bureau. Là-bas, il est allé au bureau de l’aide de camp qui n’était pas là parce que ça communiquait directement avec le bureau du président Thomas Sankara. Ensuite, nous sommes allés au Conseil avec les trois véhicules.

J’ai placé les éléments devant la porte et je suis allé au secrétariat et j’ai vu Laurent Ilboudo là-bas. C’est pendant que nous étions là-bas qu’on a entendu des tirs. On nous a amenés à l’arrière de la salle et ils ont rafalé. Gouem Amidou m’a dit :  » Docteur, aidez-moi, j’ai perdu beaucoup de sang ». Je lui ai dit que je n’avais pas ma trousse.

Il est formel, ce jour-là, il n’a pas vu Bossobè Traoré au Conseil. Lors de la confrontation, Bossobè Traoré a fait savoir qu’au Conseil que c’est Sow Drissa qui lui a dit de placer les hommes dans le couloir. Sow Drissa affirme le contraire. Selon lui, chacun connaissait sa place, parce que c’était la routine. Et le jeudi, tout le monde savait qu’il y avait sport et chacun avait mis sa tenue dans un sac. Bossobè Traoré a aussi parlé de la présence de Doré Patenema. Mais, Sow Drissa dira qu’il n’était pas dans leur groupe  » Bossobè, il faut être clair. Ce dernier se ravisera en notant  j’ai raté cela.

Par rapport à la présence de Bossobè au Conseil, Hyacinthe Kafando a dit :  » il est bête ou quoi, il était au courant et il est venu ».

Soldat de première classe à la garde rapprochée de Thomas Sankara, Zidwouemba Claude François dira qu’au Conseil, j’étais à la porte du bureau du patron, parlant de Sankara, avec Noufou Ouédraogo. Quand la 504 blanche a foncé dans le couloir du secrétariat, moi j’ai pu me réfugier dans un bureau. Et Sankara lui a demandé qui sont ceux qui tirent. J’ai dit que ce sont les éléments de Blaise Compaoré.

J’ai déposé mon PA et suis sorti le premier. Quand Hyacinthe Kafando m’a vu, il m’a dit :  » salopard, ce n’est pas toi qu’on veut, quitte là-bas ». Entre-temps, Sankara est sorti et je l’ai  entendu dire : « je me rends ». Et j’ai entendu des tirs. On m’avait fait coucher à côté des fleurs. Ouédraogo Arzouma dit Otis a commencé à tirer sur nous.

Il a tiré d’abord sur Somda Der, puis un autre, avant que Hyacinthe Kafando ne crie sur lui : « Otis ne tue pas les enfants ». Et il lui a demandé qui a couru  sortir. Il a dit c’est Bossobè Traoré. Et Hyacinthe Kafando de répliquer :  » pourquoi tu ne l’a pas tué, il est bête ou quoi, v il est au courant et il est venu. Lui aussi confirme que Bossobè Traoré n’était pas dans leur groupe.

Il faut noter que dans la salle, au moment où le président du tribunal a fait appeler Zidwouemba Claude François à la barre, dans le public, un jeune a levé la main. Il  a insisté pour parler, car dit- il, il était un CDR qui veut donner sa part de vérité. Peut-être ce mardi, il pourra en avoir l’occasion.

Moussa Wandaogo/Ouaganews

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